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Cultiver des Bonsaïs en Intérieur

par Brent Walston
Traduit de l'Anglais par Jean-Christophe Godart

Introduction

Une des idées fausses les plus répandues à propos des bonsaïs est qu'ils doivent être cultivés en intérieur. À l'exception des plantes tropicales et subtropicales, tous les bonsaïs devraient être cultivés en extérieur. Les plantes ligneuses de climat tempéré doivent subir une période de dormance, de repos dû au froid pour survivre. Cette dormance fait partie d'un cycle annuel. Pour les arbres à feuillage caduque c'est un phénomène évident, mais, Les persistants de climat tempéré comme le genévrier ont aussi besoin de ce cycle.

Les plantes tropicales ligneuses et autres 'plantes d'intérieur' peuvent être formées avec succès en bonsaï et cultivés à l'intérieur toute l'année. Dans les climats doux, des bonsaïs de climat tempéré devraient rester à l'extérieur toute l'année. Dans les climats froids, les plantes de climat tempéré devraient être cultivées en extérieur durant les saisons plus chaudes de l'année, mais auront besoin d'une protection hivernale (le sujet d'un autre article). Il est possible de cultiver des plantes de climat tempéré à l'intérieur en hiver si elles ont d'abord subi la période nécessaire de dormance.

L'envie est forte pour les débutants de cultiver leur bonsaï en intérieur. Bien que quelques espèces traditionnelles en bonsaï peuvent être cultivées en intérieur toute l'année si on leur procure une période de dormance, vous devez savoir que cela requiert une expérience habituellement acquise après avoir cultivé des bonsaïs durant plusieurs années. Ci dessous, vous trouverez les procédures à suivre pour les bonsaïs d'intérieur.

Le Besoin en Forte Luminosité

Les problèmes principaux de la culture en intérieur sont le manque de luminosité intense et d'une période de dormance pour les plantes de climat tempéré. Même si vous gardez votre plante devant une fenêtre sans rideaux orientée au Sud, je doute que la lumière soit suffisante pour beaucoup d'espèces ligneuses. La plupart des gens ne réalisent simplement pas à quel point il fait sombre dans une maison, même devant une fenêtre.

Considérez que, à l'extérieur, la lumière vient non seulement du soleil direct, mais de 180 degrés du ciel environnant PLUS toute le lumière réfléchie par les objets pour les autres 180 degrés. La lumière d'une fenêtre est à peine plus forte qu'une source lumineuse ponctuelle. Si vous mesurez le niveau de lumière avec une cellule d'appareil photo (en ne l'orientant pas directement vers le soleil, mais obliquement pour obtenir une valeur moyenne), vous trouverez que le niveau à l'intérieur est de deux à trois crans d'ouverture (f) inférieur à celui juste à l'extérieur de la fenêtre. Un cran d'ouverture (f) correspond à une lumière deux fois moins intense, deux crans à quatre fois moins, etc.

D'expérience je peux vous dire que la plupart des plantes ligneuses se portent le mieux du plein soleil à la mi-ombre. J'obtiens un ombrage de 50% en cultivant les plantes sous une toile d'ombrage. À un niveau moins intense, la 'performance' chute, et à 70% d'ombrage, les plantes s'étiolent et les problèmes commencent.

Vous pouvez corriger cela en mettant votre bonsaï devant la fenêtre la plus ensoleillée de votre habitation, mais pas trop près de la vitre ou il va subir des coups de chaleur excessive. Cette lumière peut devenir trop intense pour certaines espèces tropicales qui poussent naturellement à l'ombre des grands arbres, mais pour la plupart des plantes de climat tempéré c'est encore insuffisant. Ajoutez au dessus des plantes une lampe fluorescente pour ces espèces. Maintenez la lampe à environ 15 cm (6 pouces) au dessus de la plante. Des fixations pour deux tubes de 40 watt sont économiques à l'achat et à l'usage. Des ampoules spéciales ne sont pas nécessaires. Maintenez la lampe allumée durant 12 heures par jour pour compléter la lumière solaire. Si vous n'avez pas une fenêtre avec assez de lumière même pour des plantes tropicales à faibles besoins en lumière, vous pouvez utilisez sans risque des lampes fluorescentes comme indiqué ci dessus en tant que seule source de lumière.

Procurer une Période de Dormance

L'autre problème majeur est l'absence de période de dormance due au froid. Les plantes de climat tempéré, même les persistants, ont besoin de dormance ou d'une période de repos activée par des températures froides. Pour la plupart des plantes, c'est une période d'au moins six à huit semaines à des températures de -1 à 4,5°C (30 à 40°F) ou plus basses. La plupart des bonsaïs d'espèce ligneuse tempérée peuvent tolérer des températures basses jusqu'à -6,5°C (20°F) sans aucune protection. Beaucoup de plantes vont bien sûr perdre leur feuilles à ce moment. D'autres espèces comme l'orme de Chine, Ulmus parvifolia peuvent ou non perdre leurs feuilles durant cette période de dormance. À des températures douces (au dessus du gel) ils vont garder leurs feuilles, en perdant toutes leurs feuilles durant la saison suivante, mais pas toutes à la fois, donc il semble persistant. Gardé à l'extérieur dans les zones USDA 8 ou moins (NDT c'est le cas de presque toute la France et la Belgique), ils vont presque toujours être caduques (selon le cultivar et la rigueur de l'hiver). Les espèces persistantes tempérées ont également besoin d'une période de dormance due au froid, mais ne vont pas perdre leur feuillage.

Sans cette période de dormance, les espèces caduques vont continuer à pousser jusqu'à deux ans, ensuite elles vont rentrer en dormance peut importe la saison ou la température. Ce peut être très stressant pour la plante, et sera dans certains cas fatal.

Arrosage

Un autre problème est l'arrosage. Quasi personne avec une longue expérience en bonsaï ne conseille d'arroser régulièrement par immersion, ou d'arroser à des intervalles programmés. C'est un moyen commercial de faire croire que le bonsaï semble facile. L'arrosage par immersion peut convenir dans certains cas, par exemple quand la plante est extrêmement sèche et a un besoin urgent d'être ressuscitée, ou si elle vient d'être rempotée, ou si vous désirez la plonger dans une solution d'engrais. L'arrosage par immersion tend à accumuler les sels dans le sol. Arroser par le dessus aidera à évacuer du sol les sels et les gaz usés. Arrosez par le dessus avec un arrosoir à pomme à fins trous, en faisant 's'écouler' l'eau sur la plante et attendez quelques secondes pour que l'eau soit absorbée, avant d'arroser à nouveau. Répétez ceci jusqu'à ce que l'eau s'évacue des trous de drainage. Cela va réduire les débordements et éviter d'éroder le sol. Pour une seule plante cela peut prendre trente secondes. Ne laissez jamais une plante tremper dans un fond d'eau (les rares exceptions sont la glycine, Wisteria et le cyprès chauve, Taxodium cultivés en extérieur).

L'arrosage à l'extérieur par temps estival ensoleillé est facile, les plantes sèchent chaque jour, donc vous les arrosez chaque jour. En intérieur c'est plus difficile. Vous ne devez arroser que quand les plantes ont besoin d'eau, pas de façon programmée. L'intervalle de temps varie selon le niveau de lumière, la température, le degré d'envahissement des racines dans le pot, la quantité de feuillage, et l'humidité.

Il y a trois méthodes de base pour déterminer si une plante a besoin d'eau. Ma favorite, mais pas nécessairement la meilleure, est simplement de soupeser le pot. Les plantes sèches sont sensiblement plus légères que celles bien arrosées. Vous pouvez aisément apprendre à sentir la différence. La seconde méthode consiste à gratter le sol avec votre doigt et voir le degré d'humidité sous la surface. Cela varie quelque peu selon le sol et le volume, mais si le sol est sec en dessous de 6,5 mm (1/4 pouce), il est probablement nécessaire d'arroser. Si la surface est encore humide, il ne devra certainement pas être arrosé. La troisième méthode est le 'Bâtonnet de Persiano', une méthode préconisée par un de nos illustre membre de l'Internet Bonsai Club (IBC). Utilisez un bâtonnet, morceau de chop stick ou de brochette en bois comme une sorte de sonde. Laissez le planté dans le pot. Pour tester l'humidité, retirez le et vérifiez l'humidité sur le bâtonnet. S'il est sec, il est temps d'arroser. Toutes ces méthodes demandent un peu de pratique, mais vous devriez être capable d'en apprendre convenablement une ou toutes en une semaine environ.

Fertilisation

Vous pouvez fertiliser de façon programmée, et c'est probablement la meilleure manière. La plupart des engrais solubles conseillent de fertiliser à dose normale toutes les deux semaines. Il suffit de les diluer dans l'eau. Utilisez les toujours à la dose indiquée sur l'emballage. Oubliez l'histoire des demi-doses pour le bonsaï, c'est un mythe, utilisez les comme indiqué. Commencez à fertiliser quand la plante démarre sa croissance et arrêtez au début de la période de dormance. Pour les plantes tropicales continuez à fertiliser tant qu'il y a des signes évidents de croissance.

Circulation d'Air et Humidité

Des considérations secondaires, mais importantes, pour la culture en intérieur sont la circulation d'air, l'humidité, et le contrôle des parasites et maladies.

La circulation d'air en été peut être simplement réalisée en laissant la fenêtre ouverte pour avoir une légère ventilation. En hiver vous pouvez désirer placer un très petit ventilateur pour apporter une petite bouffée d'air à votre plante.

On insiste beaucoup trop sur l'humidité pour les plantes de climat tempéré gardées en intérieur. Pour beaucoup de débutants, la brumisation est une religion, une manière de montrer que vous prenez soin de vos plantes, mais beaucoup de plantes n'ont pas besoin d'autant de soins. Beaucoup de plantes tropicales ont besoin d'une humidité élevée, les plantes de climat tempéré non, mais il est important de ne pas approcher les niveaux d'un désert aride, ce qui peut survenir à l'intérieur en hiver. Brumiser les plantes une ou deux fois par jour à mon opinion est un procédé qui ne vaut rien. La seule chose qui arrive quand vous brumisez de cette manière est que des dépôts de sels apparaissent sur les feuilles quand elles sèchent. Si vous brumisez l'ensemble de la zone autour de la plante pour augmenter l'humidité, alors vous faites quelque chose d'utile, mais dans une maison ce n'est habituellement pas possible. Au lieu de ça, augmentez l'humidité en plaçant vos plantes sur un lit de petits graviers dans un large plateau rempli d'eau. Ne laisser pas le pot en contact avec l'eau. Plus le plateau sera plat mieux ce sera, cela aidera à éviter l'apparition des algues et autres (? critters) parce que presque tout le volume d'eau va s'évaporer chaque jour.
NDT : l'augmentation de l'humidité est minime avec cette méthode. Pour s'en convaincre, il suffit de voir la très faible quantité d'eau qui s'évapore. Il est préférable d'utiliser un humidificateur. Pensez aussi à éloignez les plantes des radiateurs.

Contrôle des Parasites et Maladies

Le contrôle des parasites et maladies va en fait commencer quand vous faites tout ce qui est indiqué ci dessus, parce que vous aurez des plantes en bonne santé qui seront capables de leur résister. Mais, ils sont liés à certains problèmes. Examinez de très près s'il y a des acariens. Ils sont presque microscopiques, et sont mieux visibles avec des loupes grossissant de 5 à 10 fois. Ils vivent à la face inférieure des feuilles, donc c'est là qu'il faut les rechercher. Tournez une feuille et recherchez des fines toiles d'araignée ou des débris. Une feuille saine aura un aspect absolument propre (sauf si vous avez brumisé beaucoup et que des sels se sont déposés) excepté les poils qu'ont certaines espèces. Si vous voyez des débris ou une toile d'araignée, commencez à rechercher les acariens. Ce sont des petites créatures en forme d'araignée et elles pondent de minuscules oeufs rond et translucides. Les araignées rouges sont faciles à voir à la loupe et visible à l'oeil nu pour ceux d'entre vous qui ont moins de quarante ans. Les acariens à deux points sont plus petits, translucides excepté les deux points foncés sur leur dos, et peuvent même être difficile à voir avec une loupe grossissant cinq fois, vous devez les rechercher.

Les acariens (? Mites), pucerons, pucerons laineux, (? mealy bugs), cochenilles, et presque tous les parasites potentiels peuvent être contrôlés si on les détecte tôt et on les traite avec l'insecticide approprié. Ces insecticides peuvent être phytotoxiques pour certaines espèces et endommager les feuilles, donc essayez d'abord sur quelques feuilles pour être certain. Des traitements répétés sont nécessaires pour éradiquer les nouvelles pontes d'oeufs. Dans le plupart des cas, trois traitements espacés de cinq à sept jours suffisent. Dans les cas très difficiles, vous pouvez devoir recourir à des insecticides chimiques. Suivez toujours scrupuleusement les instructions. les insecticides systémiques peuvent prévenir les attaques de certaines espèces d'insectes, mais vous devez savoir que vous vivez continuellement en présence d'un produit chimique mortel. Ce peut être important en particulier pour les plantes d'intérieur.

Les maladies cryptogamiques et autres sont, à mon opinion, plus difficiles à diagnostiquer et à traiter. Sans un organisme, comme un insecte, à identifier, le diagnostic devient très difficile, même pour les experts par moment. Les maladies des plantes résultent la plupart du temps de la présence d'un organisme, et pas de l'organisme lui-même. C'est particulièrement vrai pour les maladies cryptogamiques. La plupart des maladies cryptogamiques des plantes en pots sont causées par la création d'environnements plus favorables à l'organisme et moins favorables à la plante, donc commencez par améliorer l'environnement. Si vous avez une pourriture des racines, augmentez le drainage des sols, arrosez moins souvent, donnez plus de soleil (si approprié), améliorez les conditions de culture afin que les racines envahissent plus rapidement le pot. Si vous avez des maladies cryptogamiques sur les feuilles, réduisez l'humidité, arrêtez de brumiser, donnez plus de lumière et une meilleure circulation d'air. Si cela ne marche pas, demandez de l'aide pour identifier le problème de façon à utiliser le fongicide approprié, s'il en existe un.

En Conclusion

Suivez ces conseils et vous devriez être capable de cultiver des espèces adaptées à l'intérieur en bonsaï. Il ne sera pas possible de cultiver toutes les espèces en intérieur. Vous devez ne choisir que celles qui ont une chance modérée de succès. Commencer avec la plus facile, le Ficus, une plante réellement robuste qui convient bien à la culture en intérieur.

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Traduit et publié avec l'aimable autorisation de Brent Walston.
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